By Philidia on dimanche 31 décembre 2017
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Trouver des noms aux champions

 
Noms provisoires catastrophiques, d'autres qui n'ont pas vu le jour et coquilles occasionnelles.
 
Trouver des noms aux champions
 
Kled, Xayah, Illaoi, Kayn. Voici quelques noms que les joueurs de League of Legends ont déjà entendus, lus et peut-être même criés… mais d’où viennent-ils ?
 
Les scénaristes sont les premières personnes que l’on interroge quand il s’agit de trouver un nom à un futur champion. Ce processus commence dès le premier jour et nécessite de nombreuses recherches, concertations et idées abandonnées. Car les scénaristes ne sont pas les seuls à y réfléchir : il y a aussi l’équipe des champions et celle de la localisation. Au final, un seul nom sort vainqueur de cet implacable système.
 
Ébauches d'histoires et noms provisoires catastrophiques
 
La recherche d’un nom commence lorsque nous avons choisi une direction pour les illustrations, l’histoire et la personnalité du champion. « Le nom est la chose à laquelle on pense tout le temps. Ou alors on essaye d’arrêter d’y penser ! », explique Michael « CoolRadius » McCarthy, scénariste pour le jeu. Même quand on arrête d’y penser un moment, le choix d’un nom devient très vite inévitable dès que nous commençons à travailler sur les premières ébauches d’histoires. Ce que nous appelons « ébauches d’histoires », c’est un peu comme la version narrative des illustrations conceptuelles. Les auteurs inventent une petite histoire à propos d’un nouveau champion pour essayer de sonder et de dégager sa personnalité.
 
« Nous utilisons tout de même des noms quand nous écrivons une histoire, juste pour voir comment ça fait », explique Odin « WAAAARGHbobo » Shafer. « Est-ce que ça fonctionne un peu ? Ou est-ce juste très étrange ? ».
 
Lorsque nous partageons ces histoires avec le reste de l’équipe, les choses peuvent se corser. Comment appelle-t-on un champion qui n’a pas de nom ? Les scénaristes essayent souvent, aussi bien dans les ébauches que par la suite, de donner aux champions un nom temporaire (il peut parfois devenir permanent !). « Les noms temporaires ont tendance à s’imposer », précise Ariel « Thermal Kitten » Lawrence. « Les gens s’y attachent, et c’est très difficile de leur enlever après ».
 

 
Kindred est un exemple de nom temporaire qui est devenu permanent. Nous avons toutefois étudié beaucoup d'autres propositions avant. L'équipe a trouvé que « Kindred » était le meilleur nom possible, car il dégageait un esprit de « conte de fées » assez sombre (un objectif pour le nom de ce champion) et qu'il était la combinaison de « kin » (en anglais, un membre de la même espèce) et de « dread » (en anglais, la crainte).
 
Pour éviter de donner un nom trop tôt, les auteurs utilisent différentes techniques :
 
 

 
Se fixer des objectifs
 
Avant de réfléchir aux noms à proprement parler, les scénaristes se concertent pour se fixer des objectifs. Ils mettent au point des sortes de règles universelles qui peuvent s’appliquer à tous les noms. Par exemple, ils doivent être faciles à prononcer (Illaoi est une exception !). En plus de ces règles, chaque champion possède entre trois à cinq objectifs, listés par ordre d’importance.
 
Pour Camille, par exemple, nous avions certains critères en tête :
 
 

 
Ces objectifs aident les auteurs et le reste de l’équipe des champions à juger si les noms potentiels sont adaptés ou non. « Parfois, on partage des noms avec l’équipe et tout le monde en adore un, sauf une personne qui le déteste : ”L’ex de ma sœur était un bouffon et il s’appelait Xeraaggherimer ! Impossible ! Trouvez-en un autre” », raconte CoolRadius. « C’est pour ça qu’avoir des objectifs décidés à l’avance est important. Ils nous permettent de savoir si le nom est  adapté au champion ».
 
Il y a aussi des considérations générales qui s’appliquent à tous les noms de champion, comme :
 
 
Choisir le nom
 
Une fois que les objectifs sont définis, les scénaristes dressent une liste de noms potentiels. Selon le champion et la personne qui s’en occupe, le nombre de noms sur la liste peut varier. En général, nous en avons entre 100 et 200, mais ça peut aller jusqu’à 500, lorsqu’il y a différentes orthographes possibles par exemple.
 
Nous commençons souvent par regarder des noms de bébés dans des livres ou sur des sites spéciaux, mais les noms sur la liste ne viennent pas directement des livres. « Le nom des champions de League doit être inhabituel et unique à l’univers du jeu », explique WAAAARGHbobo « Un nom comme ”Becky” ne fonctionnerait pas vraiment ». (Oui, Caitlyn est un prénom qui existe, mais Riot ne fonctionnait pas de la même manière à l’époque)
 
Lorsque nous avons cherché le nom pour Illaoi, nous avons commencé à référencer les noms issus de différentes bases de données, mais finalement, aucun de ses noms potentiels n’est venu de ces sources. Nous voulions pour elle un nom exotique (ce n’est pas toujours le cas), car elle vient d’une nation insulaire lointaine de Runeterra.
 

 
WAAAARGHbobo a étudié les conventions autour des noms dans les anciennes civilisations qui parlaient polynésien, australien, grec, hawaiien ou encore latin. « J’ai essayé de voir ce que ces langues avaient en commun : quelles étaient les lettres identiques ? Celles qui n’étaient pas utilisées ? », raconte WAAAARGHbobo. Par exemple, le double « L » semblait très commun, alors que la lettre « V » était presque inexistante (mais ce son semblait pouvoir être créé de plusieurs autres manières). « À partir de là, il s’agit de dresser la liste des noms qui respectent toutes les règles ». D’autres noms imaginés pour Illaoi étaient Illuora, Illuka, Ieolu, Yaotl ou encore Yutu.
 
Parfois, trouver un nom aux champions commence avec quelques recherches. « Je lis des livres qui me permettront de comprendre plus de choses et qui m’aideront à m’immerger dans leur monde », explique FauxSchizzle. « Pour Ornn, j’ai lu énormément de choses sur les volcans et sur la mythologie nordique ». Nous pouvons aussi essayer de découvrir l’origine du nom. « Si pour un nom, je ne suis pas sûr de l’orthographe, je peux essayer de remonter la piste jusqu’à l’origine latine ou arabe du nom, pour voir comment je peux l’intégrer à l’orthographe finale », ajoute Thermal Kitten. « J’obtiens alors une énorme liste que j’affine au fur et à mesure ».
 
Une autre approche consiste à se fier aux conventions de la région propre au champion. « Les règles d’une région, lorsqu’elles sont définies, sont intentionnellement vagues, car les langues sont assez flexibles », explique WAAAARGHbobo. Par exemple, les noms targoniens sont très helléniques (grecs ou romains) à la fois dans les syllabes et dans les significations. Les champions du Néant proviennent du shuriman antique (différent du shuriman contemporain), et leur nom est généralement composé et séparé par une apostrophe. Les noms des yordles ont souvent des lettres doublées, ont l’air innocent et sont assez simples (à l’exception de Heimerdinger).
 

 
Lorsque nous réfléchissons au nom d’un champion, nous regardons également la liste de tous les champions de League of Legends par ordre alphabétique pour identifier les lettres qui « manquent », ou qui sont beaucoup moins courantes que les autres. Nous voulons trouver des noms qui représentent bien le champion et, dans l’idéal, qui puissent compléter la liste. « Ce genre de règles nous aide à suivre une piste au départ, même si ce n’est pas celle que nous suivrons ensuite », précise CoolRadius.
 
La plupart du temps, le nom définitif ne vient pas combler la liste des initiales manquantes, mais c’est aussi parce que les lettres en elles-mêmes ont du sens. Par exemple :
 
 
Il y a aussi des lettres que les scénaristes essayent d’éviter à tout prix :
 
 
Que se passe-t-il ensuite ?
 
Les scénaristes réduisent la liste pour qu’elle ne contienne plus qu’entre 25 et 100 noms. Si la liste est trop longue, ils peuvent créer leur propre « top 10 ». La liste est ensuite envoyée à l’équipe des champions, qui fait part de ses impressions… et en général, ils ont beaucoup de choses à dire. « Tout le monde a son avis sur les noms, c’est pour cette raison qu’il est important de connaître les objectifs de l’équipe à l’avance », explique FauxSchizzle.
 
L’équipe des champions élit les noms qu’elle préfère et ceux qu’elle aime un peu moins. Parfois, tout le monde est d’accord sur les meilleurs noms. Mais ça n’est pas toujours le cas. « Vous arrivez avec une liste de noms qui peuvent fonctionner, vous avez passé du temps à faire des recherches, et aucun nom ne convient », se lamente FauxSchizzle. Lorsque c’est le cas, les scénaristes regardent les noms qui ont été le plus appréciés et essayent de dégager des similarités. Ils peuvent alors trouver d’autres noms qui suivent la même tendance pour créer une nouvelle liste de noms.
 
Si tout le monde arrive à se mettre d’accord sur un top 10, nous pouvons enfin envoyer la liste à l’équipe en charge de la localisation. Les Rioters des autres régions examinent les noms et nous signalent lorsqu’un nom veut dire quelque chose d’étrange dans une autre langue. Chaque nom reçoit alors un « oui », un « pourquoi pas » ou un « NON DÉFINITIF ».
 

 
Capture d'écran du fichier utilisé par les régions pour nous indiquer si le nom convient (et aperçu de ce que ça donne lorsque ce n'est pas le cas). Dans cet exemple, pour le portugais brésilien, les noms « Kwo » et « Kuo » sont rejetés car trop proches d'une insulte, et Ukura est signalé comme étant « non optimal », car trop proche également d'un mot vulgaire dans cette langue.
 
« Oui » : le nom est validé, il convient pour le champion. « Pourquoi pas » : le nom n’est pas offensant, mais il peut paraître un peu étrange. Par exemple, Camille sonnait un peu comme « chameau » dans certaines langues. Un autre nom pour Rakan voulait dire « biberon pour hamster » dans une autre langue. Thermal Kitten ajoute que « c’est à ce moment-là qu’il faut décider si un nom est trop offensant. Et si c’est le cas, pour combien de joueurs ? Le nom correspond-t-il bien au champion ou peut-il poser un problème ? ».
 
Lorsqu’un nom reçoit un « non définitif », c’est parce qu’il s’agit d’une insulte ou d’un blasphème. « Parfois, il y a un nom que nous aimons beaucoup, et au final il veut dire “cul” dans une autre langue », ironise FauxSchizzle.
 
Et cet exemple n’a pas été inventé.
 
À l’origine, Xayah était appelée « Xaya ». Le nom est arrivé jusqu’au processus de localisation habituel, mais l’équipe s’est rendue compte qu’il s’agissait du terme technique médical pour parler des testicules en azéri. « J’ai tapé ”Xaya” dans la recherche d’images Google et, oui, j’y ai trouvé un diagramme officiel », s’amuse FauxSchizzle. « Je me suis dit que ce n’était pas l’idéal, alors nous avons changé Xaya pour Xayah, et le problème était résolu ».
 
Désormais, nous tapons tous les noms dans Google pour être sûrs de ne pas commettre une grossière erreur !
 

 
C'est votre dernier mot ?
 
La phase de localisation peut parfois réduire la liste à deux ou trois noms. Généralement à ce moment-là, il n’en reste plus tellement de toute façon. Dans le meilleur des cas, l’équipe arrive à se mettre d’accord sur un nom définitif pour le champion. Sinon, c’est un peu plus compliqué. « Le groupe ADN (Art, Design et Narration) est celui qui tranche si le reste de l’équipe n’arrive pas à choisir. C’est eux qui ont le dernier mot », explique WAAAARGHbobo. « Personnellement, lorsque nous atteignons le top 10, tous les noms me conviennent ».
 
Généralement, nous arrivons à convaincre tout le monde de se rallier derrière un nom. « Si nous ne trouvons pas de terrain d’entente, et c’est rarement le cas, l’équipe se tourne vers vous et vous dit : ”C’est toi l’auteur, on te fait confiance. Tu en penses quoi ?” », raconte FauxSchizzle. « Et c’est super, mais ensuite, vous finissez pas dire ”Euh, ok… celui-là ? Et vous partez en courant !” ».
 
Voici une liste de nom qui n’ont jamais vu le jour et les raisons qui expliquent pourquoi. Pour chaque champion, nous avons ajouté les objectifs que nous avions en tête pendant leur développement. Si vous voulez aller plus loin, cliquez ici pour télécharger la liste complète de noms potentiels pour Jhin, par WAAAARGHobo ou la liste complète des noms potentiels pour Ornn, par FauxSchizzle.
 

   Camille

 
Objectifs :
 
Évoquer l’excentricité de l’aristocratie, donner l’idée d’une dame noble de Piltover, être séduisant sans pour autant être trop « beau » à l’oreille, être clairement féminin, et pouvoir être raccourci en un diminutif s’il était trop long.
 
 

   Taliyah

 
Objectifs :
 
Nom clairement féminin, un nom que donnerait une famille de nomades à sa fille aimée, qui évoque la culture nomade, tribale, ou du désert, naturellement court (deux syllabes environ), mais un nom plus long est possible si le diminutif est évident.
 
 

   Xayah

 
Objectifs :
 
Un nom élégant, exotique mais simple, original avec des éléments ioniens, un nom pouvant faire partie d’un duo qui fonctionne (Xayah et Rakan).
 
 

   Kayn

 
Objectifs :
 
Un nom fort qui laisse planer un certain mystère, similaire à Zed ou Shen pour la prononciation (ionien), rapide, concis, une à trois syllabes marquantes et qui peut être facilement abrégé.
 
 
Rhaast (L'arme de Kayn)
 
Objectifs :
 
Doit donner un air menaçant, presque guttural ; utilisation démoniaque de certaines lettres, son et apparence inhabituels, du même type que Aatrox.
 
 

   Ornn

 
Objectifs :
 
Doit sonner comme un dieu pré-freljoridien oublié, bourru et viril, une syllabe de préférence ; dans la mesure où « Forge » est plus ancien que Freljord, des sons plus anciens et plus exotiques peuvent passer, mais pas trop nordique non plus (juste une impression).
 
 

   Kled

 
Objectifs :
 
Nom noxien et crédible pour un Yordle, doit être dur et drôle en même temps, donc court, pas trop sophistiqué, facile à prononcer, un peu plouc/orque, unique parmi les champions de League.
 
 
Skaarl (La monture de Kled)
 
Objectifs :
 
Un nom qui aille avec Kled et les conventions qui entourent les noms de Noxus, qui sonne dur et un peu idiot, mais moins que Kled, car on peut imaginer que c’est Kled lui-même qui l’a baptisé. Un nom court et facile à prononcer (voir objectif 3), que l’on puisse protéger par des droits d’auteur dans ce contexte, et un peu plouc également.
 
 

   Zoe

 
Objectifs :
 
Facile à prononcer, un nom de petite fille à consonance targonienne (par exemple, des noms « latins » aux influences arabes, voire byzantines).
 
 
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