Une nouvelle histoire pour Shen !

 

 

Après avoir reçu une refonte, on pouvait s'attendre à ce que Shen reçoive comme beaucoup de champions passés par cette étape et ayant une histoire un peu ancienne, à ce que cette dernière soit revue. C'est désormais chose faite, et la nouvelle histoire est disponible sur la page de Shen, sur le site officiel.

« L'Œil est insensible à la peur, à la haine, à l'amour... à toutes les choses qui mettraient l'équilibre en péril. »

Chef d'un clan secret de guerriers mystiques, Shen incarne l'Œil du crépuscule, chargé de préserver l'équilibre dans le monde. Souhaitant échapper à toutes les formes de confusion provoquées par les émotions, les préjugés ou l'ego, Shen lutte continuellement, sa lame spirituelle à la main, pour se maintenir sur le chemin invisible du jugement impartial.

Véritable énigme pour le royaume ténébreux des esprits comme pour celui, mortel, des êtres humains, Shen n'a sa place ni dans l'un, ni dans l'autre. Il est le réceptacle d'une fusion peu orthodoxe entre âme humaine et puissance arcanique. Pour les deux camps, il constitue un élément à craindre. Il est immuable. Il est constant. Il n'a d'autre allégeance que sa mission.

Bien que sa naissance au sein du plus vénéré des clans de Ionia l'ait prédestiné à cette tâche, c'est sa volonté de fer qui a fait de Shen le guide idéal d'un ordre occulte. Armé de sa lame spirituelle, qui incarne le symbole de son devoir et qui le relie au royaume des esprits, Shen parcourt les deux mondes, infailliblement attiré vers les lieux où l'un des deux camps menace de prendre le dessus.

On ne compte plus les légendes qui évoquent les combats de Shen à travers les deux royaumes. De ses innombrables affrontements avec le Clan des Sept Démons à travers tout Ionia, que ce soit sur le plan physique ou éthéré, à sa violente purge des infâmes dévoreurs de peau dans les Steppes Noires de Freljord, la vérité se perd au milieu des multiples récits qui naissent dans son sillage.

L'un des récits les plus invraisemblables que les Ioniens se plaisent à raconter concerne le jour où Shen serait soudain apparu dans la cour centrale de Noxus. Là, en plein cœur de la forteresse de ses ennemis, les témoins ont assisté avec horreur à son terrible combat contre une menace invisible que nul ne pouvait percevoir. Pour la foule de badauds, Shen semblait apparaître et disparaître sans cesse, le corps meurtri par un nombre croissant de blessures inexplicables. Ce que les Noxiens ignoraient, c'est que le ninja venait de repousser à lui seul une invasion de leur empire par une horde d'esprits venus de l'autre monde.

Bien que Shen suive un chemin solitaire sur ce plan et au-delà, il n'est pas toujours seul. D'autres membres de son ordre secret, comme la redoutable guerrière de l'ombre Akali, ou le ninja yordle Kennen, qui commande à la foudre, se tiennent toujours prêts à lui apporter leur aide.

Mais s'il compte plusieurs alliés, Shen est le seul dépositaire de la lame de son père et de la responsabilité qui l'accompagne. Il est strictement interdit pour l'Œil du crépuscule de se laisser influencer dans son jugement par la moindre émotion. Bien qu'il continue de remplir son devoir sans faillir, Shen doit lutter pour contenir la colère qui le ronge suite au meurtre de son père par Zed, un homme qu'il considérait autrefois comme son frère.

Portant le destin du monde des hommes et celui du royaume des esprits sur ses épaules, Shen se bat pour maintenir l'équilibre entre ses émotions humaines et sa vocation spirituelle. Mais combien de temps un homme peut-il préserver l'équilibre de deux mondes qui se balancent sur le fil de sa lame ?

Neutralité absolue

« Ce n'était pas une tempête. C'était un esprit », affirma le pêcheur, encore secoué par le naufrage auquel il avait à peine survécu, deux nuits plus tôt. L'homme lui raconta comment son navire de pêche avait été englouti par une créature marine, aussi grande qu'une maison et rapide comme l'éclair.

Shen écouta son récit, analysant silencieusement les faits tels qu'ils lui étaient présentés.

« Montrez-moi le lieu du naufrage », dit-il.

L'homme le conduisit vers une plage dans la baie, où un groupe de villageois s'affairait à récupérer les corps noyés des marins. Shen s'agenouilla pour examiner l'un des fragments du bateau. Les entailles dans le bois étaient profondes et sauvages, manifestement l'œuvre de puissantes griffes.

« Combien sont morts ? » demanda-t-il.

« Je suis le seul survivant... Six au total », répondit le pêcheur.

Les esprits sont redoutables, pensa Shen, fouillant dans les débris du naufrage en quête d'autres indices.

Enfin, au bord d'un fragment de la coque, il trouva ce qu'il cherchait : une petite touffe de poils très fins. La plupart des gens n'auraient pas repéré ce détail. Ou alors, ils ne penseraient jamais qu'une créature capable de réduire un navire en pièces pourrait laisser derrière elle quelque chose d'aussi délicat. Mais Shen avait déjà vu des poils de ce genre auparavant. Tous ses doutes sur la véracité de l'histoire du pêcheur s'évanouirent aussitôt tandis que la mince touffe de fourrure argentée se décomposait entre ses doigts.

« Un démon, fit Shen. Vous avez dû le croiser en mer. »

Le pêcheur acquiesça d'un air sinistre. Toutes sortes d’esprits étaient connus pour leurs incursions dans le monde physique, en particulier à Ionia, où la barrière entre les royaumes était plus fine et plus facile à franchir. Les plans matériel et éthéré étaient en contact constant, glissant l’un à côté de l’autre comme une flaque d’huile sur une surface d’eau.

En tant qu’Œil du crépuscule, c’était le devoir de Shen de passer d’un monde à l’autre pour s’assurer qu’aucun des deux camps ne pourrait prendre le dessus. Pour les humains, il était semblable à un fantôme, disparaissant entre deux souffles pour réapparaître à des lieues de distance. Pour les esprits, c’était un humain, de chair et d’os, qui n’était pas censé s’aventurer dans les royaumes éthérés.

Il s’agenouilla sur la plage pour examiner l’un des cadavres qui avaient été repêchés. Celui-ci avait été déchiré en deux, juste sous les côtes. Ce qu’il restait de ses entrailles pendait lamentablement de son torse exsangue et gonflé.

« Inutile de vous inquiéter. Je m’occuperai de ce monstre avant la tombée de la nuit », fit une voix derrière lui.

Shen se retourna et vit un saint homme qui s’approchait, manifestement envoyé sur place par le temple local. Plusieurs acolytes l’accompagnaient, portant avec eux un ensemble de reliques et d’huiles mystiques. Ils entamaient un rituel pour purifier la zone de toute anomalie d’ordre spirituel. Le prélat fixa Shen de son regard, comme s’il cherchait à l’évaluer.

« Pouvons-nous compter sur votre aide, monsieur ? » demanda-t-il.

« L’équilibre sera restauré », répondit Shen avec un hochement de tête.

Il quitta le groupe d’ecclésiastiques et suivit de nouveau la maigre piste de poils fins. Il songea aux marins morts et au prix qu’il allait devoir exiger du démon. Les paroles de son père n’avaient rien perdu de leur vérité : « La tâche la plus difficile est de trouver le point d’équilibre en toutes choses. » La neutralité absolue, le centre précis de toutes les forces à l’œuvre dans le monde… voilà ce que l’Œil devait être capable de discerner.

Maintenir cet équilibre était une lutte en soi. Pour mener à bien cette mission, Shen portait avec lui deux lames dans son dos. L’une était un sabre en acier ionien qui pouvait fendre un homme en deux d’un seul coup. L’autre était une épée de pure énergie arcanique. Elle lui servait à combattre les esprits et avait été transmise de génération en génération dans sa famille. Il avait occis d’innombrables démons, fantômes, spectres et farfadets avec elle au fil des ans, et il s’attendait pleinement à devoir en faire de nouveau usage avant la fin de la journée.

Enfin, Shen arriva dans une crique isolée, paisible et épargnée par toute activité humaine. Sur un banc de sable, dans les eaux peu profondes, se trouvait le démon, sa fine fourrure brillant dans la lumière du soir. La créature enflait dans son sommeil, repue par les essences des mortels qu’elle avait tués. Shen se faufila à travers les joncs, se rapprochant silencieusement du démon assoupi. L’immense cage thoracique de la créature s’étendait et se creusait au rythme de sa respiration. Lorsqu’il ne se trouva plus qu’à quelques pas du banc de sable, il dégaina son épée et se prépara à frapper.

Tout à coup, il entendit un bruit qui interrompit son geste. C’était un cri horrifiant, suraigu, qui résonnait dans l’air autour de lui. Le hurlement lui sembla familier, mais avant qu’il ne puisse l’identifier à coup sûr, des glapissements similaires retentirent de nouveau, encore et encore, jusqu’à devenir une cacophonie de cris perçants qui lui glacèrent les sangs. Il s’agissait des hurlements d’agonie de plusieurs esprits. De nouveau, Shen posa les yeux sur le démon, qui commençait à s’agiter dans son sommeil. Il jeta un dernier regard sur sa lame spirituelle, évaluant calmement ses options. Puis il colla ses paumes l’une contre l’autre, concentra soigneusement son ki et disparut dans un vortex d’énergie crépitante, laissant derrière lui le démonendormi sur son banc de sable.

En un instant, Shen réapparut sur le site du naufrage. Tout autour de lui, des flaques d’une substance noire et fumante s’évaporaient dans les airs, et l’atmosphère empestait la peur.

Shen compta les flaques noires qui s’évaporaient, toutes générées par la mort d’un esprit. Il s’interrompit dans son calcul tandis que le prélat était de retour sur place avec ses acolytes. L’un des hommes tenait une corde faite de lin et de fils d’argent tressés. Attaché à l’autre bout de cette longe se trouvait un esprit inférieur, un lutin insignifiant. Celui-ci se débattait contre l’étreinte de sa laisse qui semblait l’étouffer. En voyant les restes de ses frères massacrés, il se mit à gémir.

« Aimeriez-vous vous débarrasser vous-même de celui-ci ? » demanda le saint homme à Shen, comme s’il lui offrait un savoureux bol de soupe pour le dîner.

Shen posa les yeux sur les flaques gluantes et fumantes qui, quelques instants plus tôt, étaient encore de puissantes entités de l’autre monde. Puis il tourna son regard vers le prêtre et le lutin qui se lamentait.

« Veuillez me pardonner, votre Sainteté » dit-il. Il rangea sa lame spirituelle dans son fourreau et dégaina alors son sabre en acier. Ce n’était pas l’épée qu’il avait prévu d’utiliser ce jour-là.